Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Cour de Cassation 10 novembre 2020 / ABS, Recel, Prescription de l'action publique /

Cour de Cassation 10 novembre 2020 / ABS, Recel, Prescription de l'action publique /

Le 22 décembre 2020

" (...)  Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. M. B..., architecte d'intérieur a été poursuivi du chef d'abus de biens sociaux pour avoir, notamment, d'une part, de 2002 à juillet 2013, étant gérant de fait de la société Cad, attribué, dans son intérêt personnel, à son épouse un salaire mensuel de 2 700 euros en rétribution d'un emploi fictif, soit une somme totale de 356 400 euros, d'autre part, entre le 15 avril et le 4 juillet 2013, facturé sous le nom de sa société M... B... Design et Stratégies des clients de la société Cad.

3. Le tribunal correctionnel, estimant que le versement des salaires n'avait pas été dissimulé, a constaté la prescription de l'action publique pour les faits commis entre 2002 et le 13 janvier 2011 et a déclaré le prévenu coupable du chef d'abus de biens sociaux s'agissant du paiement des salaires ultérieurs correspondant à la somme de 82 654 euros, compte pris du soit-transmis du parquet diligentant une enquête en date du 13 janvier 2014 interruptif de prescription et de la facturation précitée pour une somme totale de 112 560 euros.

4. Son épouse a été poursuivie pour avoir, de 2002 à fin 2012, sciemment bénéficié du produit de l'abus de bien sociaux par lui commis au préjudice de la société Cad par perception de salaires indus d'un total de 356 400 euros en rémunération d'un emploi fictif.

5. Le tribunal correctionnel l'a retenue dans les liens de la prévention et, constatant la connexité et l'indivisibilité de chacune des infractions distinctes dont ils ont été déclarés coupables, l'a condamnée, solidairement avec son mari, sur le fondement de l'article 480-1 du code de procédure pénale, à verser la somme de 356 400 euros au liquidateur de la société Cad placée en liquidation judiciaire par jugement du 6 août 2013. (...) 

Réponse de la Cour

10. Pour écarter la prescription de l'action publique invoquée par le conseil de Mme B..., l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que la prescription applicable au recel est indépendante de celle du délit originel dont il est distinct, que la prescription de l'action publique ne court que du jour où il a pris fin, alors même qu'à cette date, l'infraction qui a procuré la chose serait déjà prescrite, que le recel ne saurait commencer à se prescrire avant que l'infraction dont il procède soit apparue et ait pu être constatée dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique.

11. Les juges retiennent qu'en l'espèce, Mme B... a sciemment reçu des salaires en rétribution d'un emploi fictif de façon continue de 2002 à 2012, qu'elle en a profité et que le procureur de la République ayant diligenté une enquête par soit-transmis du 13 janvier 2014, soit moins de trois ans après la dernière perception de revenus, l'action publique n'était pas prescrite, pas même pour partie des faits.

12. L'arrêt attaqué n'encourt pas la censure.

13. En effet, les faits de recel du produit d'abus de biens sociaux résultant de l'exécution d'un seul et même contrat de travail fictif, constituent une opération délictueuse unique.

14. En conséquence, la prescription, qui n'a pu commencer à courir pour l'ensemble des faits, au plus tôt, qu'après la date de la dernière perception de revenus, ne saurait être acquise, dès lors qu'un acte interruptif de prescription est intervenu moins de trois ans après cette date.
15. Dès lors, le moyen n'est pas fondé.  (...) "

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 10 novembre 2020, 19-80.557

SOURCE : LEGIFRANCE