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Des dispositions de la loi n°2021-1040 du 5 août 2021 gestion de la crise sanitaire sont illicites en vertu du règlement n°2021/953 du 14 juin 2021

Le 18 août 2021
Des dispositions de la loi n°2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire sont contraires au règlement n°2021/953 du 14 juin 2021. Les acteurs économiques sont en insécurité juridique et judiciaire.

Des dispositions de la loi n°2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire sont contraires au règlement n°2021/953 du 14 juin 2021 relatif au cadre pour la délivrance, la vérification et l'acceptation de certificats COVID-19 de vaccination, test et rétablissement.

Le règlement évoqué rappelle bien dans son article 17 qu'il est d'effet direct. Cela signifie qu'il doit être mis en œuvre par toutes autorités françaises sans qu'il soit nécessaire par exemple de le retranscrire en droit français.

La primauté du droit européen sur le droit français est reconnu depuis plus de trente ans par toutes les juridictions françaises (Cour de Cassation: Arrêt Jacques Vabres - 1975 / Conseil d'Etat: Arrêt Nicolo - 1989).

Selon la Cour de Justice de l'union européenne (Arrêt Costa contre Enel - 1964) tout juge national étant chargé d'appliquer le droit de l'union a l'obligation de laisser de côté toute norme nationale contraire à celui-ci.

En conséquences, les dispositions de la loi n°2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire contraires au règlement évoqué doivent purement et simplement être écartées par les autorités et juridictions françaises.

Quelles sont les dispositions européennes qui contredisent la loi française?

Il convient de rappeler qu'un règlement européen doit se comprendre et s'appliquer par rapport aux fins qu'il poursuit (téléologique) et non pas littéralement comme un texte français. Ce principe est la conséquence de l'adoption d'un règlement en plusieurs langues.

Quel est le but poursuivi par le règlement?

Dans son attendu n°36, le règlement précise qu'une de ses finalités est de prohiber toute discrimination, c'est à dire une différence de traitement ou de droits, entre une personne vaccinée  et une personne qui ne l'est pas. Le texte est très clair: "il y a lieu d'empêcher toute discrimination directe ou indirecte à l'encontre des personnes qui ne sont pas vaccinées, par exemple pour des raisons médicales, parce qu'elles ne font pas partie du groupe cible auquel le vaccin contre la COVID-19 est actuellement administré ou pour lequel il est actuellement autorisé, comme les enfants, ou parce que qu'elles n'ont pas encore eu la possibilité de se faire vacciner ou ne souhaitent pas le faire…"

L'article 3 point 7 du règlement affirme que: "la délivrance de certificats en vertu du paragraphe 1 du présent article ne peut entraîner de discrimination fondée sur la possession d'une catégorie spécifique de certificat visées à l'article 5,6 et 7."

Concrètement, il n'est pas permis directement ou indirectement que la mise en place et la finalité du pass sanitaire français ait pour effet de créer une discrimination entre personne vaccinée et non vaccinée.

C'est la loi.

OR, la loi française n°2021-1040 du 5 août 2021 subordonne l'accès à certains lieux, établissements services ou évènement à la présentation d'un certificat soit de vaccination, soit d'un test, soit  de rétablissement à la suite d'une contamination par la COVID-19.

Il y a donc une différence entre une personne vaccinée et une personne non vaccinée dans l'entrave à sa libre circulation et accès aux différents services évoqués. Cette discrimination est certaine. Elle est donc contraire à l'article 3 point 7 du règlement et à son attendu n°36.

C'est pourquoi l'article 1er de la dite loi française ne peut trouver application et être mise en œuvre.

Cela dit, les autorités françaises la mettent quand même en œuvre et obligent les acteurs économiques  à la mettre en œuvre.

C'est un problème sérieux de sécurité juridique pour les acteurs concernés. En effet, en vertu du principe selon lequel nul n'est censé ignorer la loi, ils sont réputés parfaitement connaître le règlement évoqué, son effet direct et le fait que les dispositions contraires de la loi française doivent être écartées. De sorte qu'ils engagent leur responsabilité pénale et civile. Certes du fait de l'Etat français, mais cela ne va pas les exonérer pour autant car, faut-il le rappeler, ils sont censés connaître le droit. Les acteurs économiques concernées sont donc dans une réelle difficulté.

Il suffit donc qu'une action en justice soit entreprise par une personne ou une association et, indépendamment de la longueur de la procédure, tôt ou tard le dit règlement trouvera a être appliqué par une juridiction. Un acteur économique doit également bien garder à l'esprit que la sensibilité du juge à la conjoncture est justement dépendante de la conjoncture. Cela signifie que lorsque la décision judiciaire tombera, elle sera adoptée plusieurs années après les évènements présents. Quel sera le climat et la conjoncture dans deux ou trois ans? Il est possible qu'il sera très différent de celui d'aujourd'hui.

Selon moi, la solution doit venir des fédérations professionnelles qui doivent engager une action judicaire destinée à clarifier cette question. 

A cette occasion, une question "préjudicielle" pourra être posée. le juge national décide un renvoi préjudicielle devant la Cour de justice de l'Union Européenne qui clarifie ce point et dont la décision s'impose et à l'autorité de la force jugée.

Ainsi une action pour excès de pouvoir devant le juge administratif ou encore en plein contentieux en cas de préjudice pourrait permettre de poser cette question préjudicielle.

Par ailleurs la décision récente du conseil constitutionnel sur la dite loi française n'apporte aucune garantie ou sécurité car il a jugé en fonction du droit français et en lien avec les problématiques juridiques qui lui ont été posés.

OLIVIER BOULANGER - AVOCAT

 

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